“Mon père était très engagé socialement parlant. C’est sans doute l’un des traits de caractère dont j’ai hérité de lui » explique Thérèse Baillif. « Mon parcours, il est banal. Je suis originaire des Avirons et issue d’une fratrie de cinq garçons et de trois filles. Ma mère tenait une mercerie, et mon père, une épicerie. J’aidais ma mère pendant les vacances.
J’avais 10 ans, lorsqu’elle décède. C’est mon père qui s’est occupé de nous. Il n’était pas très câlins mais c’est un homme que j’admire beaucoup. Grâce à lui, j’ai eu une solide éducation. Il nous a appris à vivre en société.
On donnait un coup de main pour s’occuper des petits, les filles balayaient la cour, s’occupaient du jardin, pendant que les garçons allaient chercher de l’herbe. Pendant les années 30 et 40, les écoles se faisant rare, j’ai dû me loger dans une pension à Saint-Benoît, puis, me rendre à Saint-Denis, jusqu’à l’obtention de mon certificat d’études. J’ai rencontré mon mari et nous nous sommes installés dans un deux pièces. J’étais très coquette et les gens s’arrêtaient pour voir mes rideaux. Même si ce n’était que la moitié d’une case, je prenais soin de mes affaires. Nous avons eu deux enfants qui sont parents aujourd’hui.« L’altruisme plus fort que l’âge »
Parallèlement donc, j’ai posé mes valises à l’ONF. Toutes les femmes travaillaient au service administratif. C’est pour renforcer la place de la femme dans la société, que j’ai fondé l’AFAR ( Association des Femmes Actuelles de la Réunion ) en 1985 et une dizaine d’années plus tard l’AMAFAR ( Association des Maisons de la Famille de la Réunion ). Un gros travail a été fait. Ça fait 19 ans que j’ai pris ma retraite, comme toutes les femmes de mon âge, j’ai eu ma période de tricot, de tapisseries, de jardinage et de bouquinerie. Je me suis même octroyée une année sabbatique en 2007 pour m’occuper de ma santé et de celle de mon mari. Mais par altruisme, je suis revenue. Comment vivre bien, alors que des personnes sont en souffrance autour de soi, et qu’on lit dans les journaux que des femmes sont violentées tous les jours. C’est lorsque j’ai été conseillère municipale du temps de Tamaya et que j’ai décidé de créer la CEVIF ( Collectif pour l’Elimination des Violences Intra-Familiales ).
Je regrette les vrais messes de minuit
Le travail sur le terrain m’a permis d’évaluer la détresse et les besoins des familles.
Pour gérer tous les problèmes des autres, je me tourne vers Dieu. Il m’encourage dans mon entreprise chaque jour. Je vais à l’église au moins une fois par semaine.
Je m’y rends tous les jours de fêtes. Mon seul regret, c’est qu’il n’y a plus de messes de minuit pour le réveillon de Noël. Je ne vais pas à toutes les messes. Je suis membre de l’Association Familiale Catholique qui a principalement un rôle d’écoute. Vous savez la religion c’est bien plus qu’une pratique, c’est un mode de vie dans ma famille. Ma mère était catholique, ma grand-mère et mon arrière grand-mère et les générations précédentes aussi. La religion c’est mon moteur, elle me permet d’avancer et de faire avancer les autres. Pour anecdote, lorsque j’étais enceinte de ma fille, je suis allée à l’île Maurice. Je me suis rendue sur la tombe du père Jacques Laval et j’ai pris une fleur que je garde depuis dans mon porte-monnaie en souvenir, j’ai donné à ma fille, le prénom de Jacqueline. J’ai toujours dans mon sac depuis plus de 50 ans, une pochette en plastique avec un médaillon de Sainte-Thérèse de l’Enfant Jésus incrusté.
A l’intérieur, se trouve un chapelet que m’a offert ma belle-mère. Je ne suis pas quelqu’un de super culottée, je ne parle que si l’on me donne la parole. Je me surprends souvent de mes interventions et je me dis « c’est toi qui a dit tout ça ? ». Je parle avec mes tripes et je ne suis pas toute seule dans mon combat, de par ma foi, je suis accompagnée de Dieu et de ma mère. Pour moi, ma mère est toujours présente.
J’ai eu une maladie à l’œil qui ne se soigne pas ici. J’ai dû me rendre en Métropole pour me faire opérer. J’ai demandé à ma mère de l’aide et pendant l’opération, je me suis sentie accompagnée. Je dis souvent à mes petits-enfants, que si c’est possible, je serais toujours à côté de vous.
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